Classement de l'éventail d’hôtes des agents de lutte biologique à l’aide de paramètres quantitatifs de spécificité taxinomique

Citation

Abram, P.K., Labbe, R.M., Mason, P.G. (2021). Ranking the host range of biological control agents with quantitative metrics of taxonomic specificity. Biological Control, [online] 152 http://dx.doi.org/10.1016/j.biocontrol.2020.104427

Résumé en langage clair

La lutte biologique contre les insectes, les végétaux et les microorganismes nuisibles avec des ennemis naturels (agents de lutte biologique) est un volet important de la protection durable des cultures au Canada. En raison de la nécessité de prévenir les effets négatifs de l'importation d'agents de lutte biologique sur la biodiversité indigène, l’évaluation de la spécificité (éventail d’hôtes) des ennemis naturels est au cœur des programmes de lutte biologique contre les organismes nuisibles. Ainsi, lorsqu’on envisage d'introduire un certain nombre d’espèces candidates comme agents de lutte biologique contre un organisme nuisible donné, il est important de comparer l'éventail d’hôtes relatif de ces agents de lutte biologique. À l'heure actuelle, toutefois, il n’existe aucun outil quantitatif largement utilisé pour comparer les éventails d’hôtes relatifs de différents organismes candidats. Dans cet article, nous proposons d’utiliser deux paramètres quantitatifs (éventail d’hôtes taxinomiques – STD; variabilité phylogénétique des espèces – PSV), qui ont déjà été utilisés dans d’autres domaines de la recherche écologique de base pour classer la spécificité relative des ennemis naturels à l'égard de l’hôte utilisés dans la lutte biologique contre des ravageurs. Ces deux paramètres saisissent non seulement le nombre d’espèces attaquées par un ennemi naturel, mais aussi leur degré de parenté. Nous montrons d’abord que même si ces deux paramètres ont été élaborés indépendamment, sur le plan mathématique, ils sont directement liés et transmettent exactement la même information, sauf qu'il s'agit d'échelles numériques différentes. Nous appliquons ensuite ces paramètres à des études de cas portant sur l'éventail d’hôtes d’agents de lutte biologique contre deux insectes susceptibles de devenir des ravageurs envahissants de l’agriculture canadienne. Nous fournissons également un code source ouvert pour faciliter le calcul de ces paramètres pour tout ennemi naturel pour lequel on dispose d’informations taxinomiques sur l'éventail d’hôtes. Enfin, nous discutons des utilisations possibles de ces paramètres dans la lutte biologique appliquée ainsi que des mises en garde et des limites importantes qui nécessitent des travaux théoriques plus poussés. Nous concluons que même si ces paramètres ne doivent pas être considérés comme des mesures absolues ou infaillibles de la spécificité des agents de lutte biologique, leur application devrait encourager les praticiens de la lutte biologique à prendre en compte explicitement la composante phylogénétique de l'éventail des hôtes lors du classement des agents de lutte biologique potentiels.

Résumé

© 2020. En raison de la nécessité de prévenir les effets négatifs de l'importation d'agents de lutte biologique sur la biodiversité indigène, l’évaluation de la spécificité (éventail d’hôtes) des ennemis naturels est au cœur des programmes de lutte biologique contre les organismes nuisibles. Ainsi, lorsqu’on envisage d'introduire un certain nombre d’espèces candidates comme agents de lutte biologique contre un organisme nuisible donné, il est important de comparer l'éventail d’hôtes relatif des agents de lutte biologique. Ces comparaisons sont habituellement faites de manière informelle en utilisant une terminologie catégorique (p. ex., généraliste, spécialiste, oligophage). Cependant, les différences relatives dans l'éventail d’hôtes naturels des agents de lutte biologique sont mieux exprimées quantitativement, avec des composantes écologiques (combien d’espèces hôtes un ennemi naturel est-il capable d’exploiter) et évolutives (comment les espèces hôtes sont-elles apparentées sur le plan phylogénétique). Nous proposons d’utiliser deux mesures quantitatives taxinomiques et phylogénétiques mises au point antérieurement (éventail d’hôtes taxinomiques – STD; variabilité phylogénétique des espèces – PSV), en combinaison avec le nombre d’espèces hôtes associées (richesse de l'espèce hôte), comme outils heuristiques pour classer la spécificité relative des candidats de lutte biologique à l'égard de l’hôte. Nous montrons d’abord que, même si le STD et la PSV ont été mis au point indépendamment, sur le plan mathématique, ils sont directement liés et transmettent exactement la même information, sauf à des échelles numériques différentes. Nous appliquons ensuite les paramètres à des études sur les éventails d’hôtes d’agents de lutte biologique contre : (i) un aleurode envahissant des cultures en serre, Aleurotrachelus trachoides (Hemiptera: Aleyrodidae), et (ii) un ravageur envahissant de la vigne, Lobesia botrana (Lepidoptera: Tortricidae). Nous fournissons également un code source ouvert pour faciliter le calcul de ces paramètres pour tout ennemi naturel pour lequel on dispose d’informations taxinomiques sur l'éventail d'hôtes. Enfin, nous décrivons les utilisations possibles de ces paramètres dans la lutte biologique appliquée ainsi que les mises en garde et les limites importantes qui nécessitent des travaux théoriques plus poussés. Nous concluons que même si ces paramètres ne doivent pas être considérés comme des mesures absolues ou infaillibles de l'éventail d’hôtes, leur application devrait encourager les praticiens de la lutte biologique à prendre en compte explicitement la composante phylogénétique de l'éventail des hôtes lorsqu’ils classent des agents de lutte biologique potentiels.