Analyse génomique et phénotypique de la thermorésistance et de la résistance aux désinfectants chez les Escherichia coli présents dans le bœuf en lien avec le locus de thermorésistance

Citation

Chez Escherichia coli, le locus de résistance à la chaleur (LRC) peut conférer différents degrés de résistance à la chaleur. Cette étude a porté sur les relations phylogénétiques ainsi que les caractéristiques génomiques et phénotypiques de bactéries E. coli avec ou sans LRC isolées de viande de bœuf par étalement direct sur gélose ou par culture dans un bouillon d’enrichissement à 42 °C. Les isolats d’E. coli LRC positifs (n = 24) ont été soumis à un séquençage du génome entier par lectures courtes et longues. Les isolats LRC négatifs (n = 18) provenant de sources équivalentes aux isolats LRC positifs ont été soumis à un séquençage par lectures courtes. Le temps de réduction décimale à 60 °C [D(60 °C)] a été évalué pour tous les isolats, ainsi que leur sensibilité aux désinfectants E-SAN et Perox-E. La croissance à 42 °C de certains isolats a aussi été évaluée. Les isolats LRC positifs et négatifs étaient bien séparés sur l’arbre génomique central, avec 22 des 24 isolats positifs regroupés en trois clades. Malgré des valeurs D(60 °C) différentes, les isolats des clades 1 et 2 étaient des isolats clonaux, comme l’a montré le sous-typage (typage par séquence multilocus [MLST]), MLST du génome de base et sérotypage). Les isolats de chaque clade étaient du même sérotype. Les isolats LRC négatifs étaient génétiquement diversifiés. Chez les isolats LRC positifs, la taille médiane du génome était de 0,3 Mbp plus grande (P < 0,001) (5,0 vs 4,7 Mbp), et on a constaté chez ces isolats une surreprésentation des gènes liés au maintien des plasmides, à la réponse au stress et aux prophages cryptiques, de même qu’une sous-représentation des gènes intervenant dans l’attachement épithélial et la virulence. Tous les isolats LRC positifs hébergeaient une copie chromosomique du LRC, et tous les isolats du clade 2 avaient une copie partielle supplémentaire du LRC sur des plasmides conjugatifs. À 42 °C, les taux de croissance étaient de 0,71 ± 0,02 et 0,65 ± 0,02 log(DO) h(-1) pour les isolats LRC positifs et négatifs, respectivement. Aucune différence significative dans la sensibilité aux désinfectants n’a été observée entre les isolats LRC positifs et négatifs.
IMPORTANCE. Les bactéries résistantes constituent un grave problème de salubrité alimentaire et de santé publique. La résistance à la chaleur conférée par le LRC varie largement entre les différentes souches d’E. coli. Les résultats de cette étude montrent que le bagage génomique et la composition du LRC, en plus de sa présence, jouent un rôle important dans le degré de résistance à la chaleur chez E. coli, et que les souches avec un certain bagage génétique sont plus susceptibles d’acquérir et de maintenir le LRC. Il faut également faire preuve de prudence lors de la récupération d’E. coli à des températures élevées, car la présence du LRC peut conférer des avantages de croissance à certaines souches. Il est intéressant de noter que les souches qui possèdent le LRC semblent avoir évolué davantage que les souches sans LRC chez l’hôte animal primaire pour s’adapter à leur habitat secondaire, comme en témoigne le nombre réduit de gènes impliqués dans la virulence et la fixation épithéliale. Les relations phylogénétiques entre les isolats semblent indiquer de plusieurs mécanismes d’acquisition du LRC par E. coli, probablement avant que la bactérie ne soit déposée sur la viande.

Résumé en langage clair

Le locus de thermorésistance (LTR) confère une thermorésistance extrême à E. coli. Le fait qu’E. coli puisse survivre à la cuisson est préoccupant, car certaines souches d’E. coli peuvent rendre les humains gravement malades. Nous avons étudié les relations phylogéniques et les caractéristiques génomiques et phénotypiques de bactéries E. coli avec ou sans LTR afin de mieux comprendre les implications des bactéries E. coli thermorésistantes sur l’innocuité du bœuf. Nous avons constaté que les E. coli à LTR-positif et à LTR-négatif se regroupaient différemment sur l’arbre phylogénétique en fonction du génome de base et que certaines des souches à LTR qui étaient très étroitement regroupées avaient des niveaux différents de thermorésistance. Fait intéressant, les E. coli à LTR avaient une sous-représentation de gènes impliqués dans l’attachement épithélial et la virulence. Aucune différence significative n’a été observée entre les souches d’E. coli à LTR-positif et à LTR-négatif quant à leur réponse aux désinfectants. Nous avons remarqué qu’une méthode d’enrichissement couramment utilisée pour E. coli peut sélectionner par inadvertance des E. coli thermorésistants, ce qui entraîne un biais dans les populations. Les résultats de la présente étude montrent que les antécédents génomiques, en plus de la présence de LTR, jouent un rôle important dans le degré de thermorésistance chez E. coli. Il faut être prudent au cours de la récupération d’E. coli à des températures élevées.

Résumé

The locus of heat resistance (LHR) can confer heat resistance to Escherichia coli to various extents. This study investigated the phylogenetic relationships and the genomic and phenotypic characteristics of E. coli with or without LHR recovered from beef by direct plating or from enrichment broth at 42°C. LHR-positive E. coli isolates (n = 24) were subjected to whole-genome sequencing by short and long reads. LHR-negative isolates (n = 18) from equivalent sources as LHR-positive isolates were short-read sequenced. All isolates were assessed for decimal reduction time at 60°C (D60°C) and susceptibility to the sanitizers E-SAN and Perox-E. Selected isolates were evaluated for growth at 42°C. The LHR-positive and -negative isolates were well separated on the core genome tree, with 22/24 positive isolates clustering into three clades. Isolates within clade 1 and 2, despite their different D60°C values, were clonal, as determined by subtyping (multilocus sequence typing [MLST], core genome MLST, and serotyping). Isolates within each clade are of one serotype. The LHR-negative isolates were genetically diverse. The LHR-positive isolates had a larger (P, 0.001) median genome size by 0.3 Mbp (5.0 versus 4.7 Mbp) and overrepresentation of genes related to plasmid maintenance, stress response, and cryptic prophages but underrepresentation of genes involved in epithelial attachment and virulence. All LHR-positive isolates harbored a chromosomal copy of LHR, and all clade 2 isolates had an additional partial copy of LHR on conjugative plasmids. The growth rates at 42°C were 0.71 6 0.02 and 0.65 6 0.02 log(OD) h21 for LHR-positive and -negative isolates, respectively. No meaningful difference in sanitizer susceptibility was noted between LHR-positive and -negative isolates. IMPORTANCE Resistant bacteria are serious food safety and public health concerns. Heat resistance conferred by the LHR varies largely among different strains of E. coli. The findings in this study show that genomic background and composition of LHR, in addition to the presence of LHR, play an important role in the degree of heat resistance in E. coli and that strains with certain genetic backgrounds are more likely to acquire and maintain the LHR. Also, caution should be exercised when recovering E. coli at elevated temperatures, as the presence of LHR may confer growth advantages to some strains. Interestingly, the LHR-harboring strains seem to have evolved further from their primary animal host to adapt to their secondary habitat, as reflected by fewer genes involved in virulence and epithelial attachment. The phylogenetic relationships among the isolates point toward multiple mechanisms for acquisition of LHR by E. coli, likely prior to its being deposited on meat.

Date de publication

2021-11-01

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